Archives mensuelles : février 2014

Oui-oui découvre le dépistage !

Pour F., un des meilleurs virus qu’on puisse attraper en matière d’amitié.

Alors voilà, l’autre jour, la nana de la station service :
– Vous prendrez de l’essence ou du diesel ?
– Ben j’en sais rien, moi.
– Votre voiture elle roule à l’essence ou au diesel ?
– Je sais pas, d’habitude je mets le truc de la pompe couleur jaune.
Elle, des yeux ronds comme des soucoupes :
– C’est du diesel, monsieur !
Après des années d’ignorance, je découvre avec stupéfaction que le truc de la pompe jaune a un nom. Ça s’appelle du diesel et, a priori, c’est très important.
[…]
Tout ça pour dire que je suis parfois un peu oublieux…
[…]
J’ai 28 ans, des nuits bien remplies (on peut tous mourir demain…) et, comme on dit “Les cordonniers sont toujours les plus mal chaussés” (sauf M. Louboutin : lui, il est pété de tunes).
Aussi quand un ami me propose de l’accompagner au CDAG (centre de dépistage anonyme et gratuit), je n’ai pas pensé que j’avais un ordonnancier à moi et que je pouvais me prescrire les examens biologiques que je désire.
Non.
J’ai pensé “Chouette, j’y suis jamais allé !” ou plutôt ça : “Chouette, je n’y suis jamais allé POURTANT je suis médecin !”
[…]
Allez ! Je vous emmène avec moi ! Go with Oui-Oui ! Tchou-tchou ! C’est la chenille qui redémarre ! (Précision : j’écris sous l’emprise du champagne, un peu d’indulgence s’il vous plait.)
[…]
Salle d’attente. Une fille, deux garçons. Bientôt, deux filles et trois garçons. Ça se remplit vite. On attend. Ça va, ça vient. J’ai pris un ticket. Je me mets à avoir peur, parce que même si on fait toujours très attention, on ne peut pas s’ôter de la tête l’idée que peut-être… Bref…
On se regarde et on joue à “Kiki pourrait être malade” : “1,2,3, vive la foire aux Chlamydia ! 4,5,6, pour toi ce sera la syphilis ! 7,8,9, t’aurais pas dû jouer à faire l’hélico pendant cette teuf, 10,11,12, fallait pas mettre un pied dans cette part… Oups !”
Comme on peut être cruel, quand on a peur !…
On attend… On attend… Mais qu’est-ce qu’il met comme temps le patient avant nous !
Échanges de regards discrets, on essaie de voir pourquoi l’autre est là, on imagine des choses. Peut-être des histoires d’amour, peut-être beaucoup plus basique. Nous sommes des animaux et, ATTENTION RÉVÉLATION (Tremblez, théorie du complot, franc-maçons et zone 51 !), comme les animaux, on boit, on mange, on défèque, on urine, on se lave et on “coït”. Parfois, on fait l’amour et là, c’est différent. Mais ça reste un besoin naturel : faire l’amour c’est comme respirer, mais on est deux (ou quatre si on a de la chance et un trèfle, treize si on est malchanceux et qu’on a ses entrées avec l’ex-patron du FMI…)
La porte s’ouvre, le médecin sort, le patient aussi. Enfin, LES patients ! Une mamie et un papi d’au moins 80 ans, la mine réjouie et leurs résultats à la main. Mamie passe devant moi, je la regarde pantois et stupide. Elle agite son papier, murmure à son vieux : “C’est négatif, mon calisson !”
Avant, j’avais peur de vieillir, je veux dire : avant, j’avais VRAIMENT peur de vieillir (et d’arrêter de respirer à deux).

Bref, si vous n’avez rien à faire et envie de jouer à”Kiki pourrait être malade” je vous conseille d’aller vous faire dépister chez votre médecin ou dans un centre de dépistage et de ne pas oublier de vous “chausser” même si vous n’êtes pas cordonnier….
Pour vous et les personnes avec qui vous respirez.
La liste est là !
Et merci pour vos messages de félicitations pour la traduction italienne !
Je vous donne la couverture polonaise dès qu’elle est prête !

Stranger in the night, syphilis in the morning !
Gaspard Proust

C’est le printemps ! On devrait tous être en train de courir nus dans les champs et baiser plutôt que s’occuper des vieux !
Entendu pendant mon internat…

L’homme-chandelle.

7 heures, dans un couloir des Urgences.
Je déteste commencer ma journée par une tentative de suicide.
Mme Didon a avalé 14 comprimés d’une boîte, 9 d’une autre, 8 d’une troisième.
Elle s’est réveillée, deux jours plus tard, assommée par les drogues. Sa sœur la giflait en appelant les secours.
Les premiers bilans biologiques confirment notre examen : elle survivra. Le foie en vrac et contre sa volonté, mais elle survivra.
Dans son box, elle pleure en fixant le mur blanc. J’ignore ce qu’elle y voit, mais son regard s’y colle avec l’insistance d’un Velcro neuf.
J’entre :
– Je me suis ratée, dit-elle en guise de salutations.
Je lui explique qu’elle a réussi, puisqu’elle est en vie.
– Vous ne comprenez pas.
– C’est vrai, je ne comprends pas, mais je peux vous raconter une histoire.
Encore crevé par la fiesta de la veille, je prends un siège et m’affale contre le brancard comme au comptoir d’un bistrot qui s’appellerait « Au café Maxence, café de la dernière chance ».
Je lui raconte l’Histoire, la Grande, la Belle, celle que je sors à chaque fois que ma route de soignant croise celle d’un prétendant au suicide.

« J’étais en stage avec un médecin généraliste. Le docteur Octopus Quichotte. Un être exécrable, vous le détesteriez. Nous recevons M. Lazare, un patient handicapé. Son fauteuil roulant est trop imposant pour franchir l’entrée, il accède au bureau par la sortie. Examen de routine, on le déshabille. Son bras gauche est collé au thorax par de la chair. Ses deux jambes sont rétractées sur les cuisses par des brides, il les replie dans une position affreuse. Son corps est un champ de bataille tordu par les cicatrices. Partout, d’anciennes brûlures au troisième degré. L’image qui me vient ? Une bougie qui a fondu. Le feu n’a rien épargné, surtout pas la mèche de la chandelle : son visage coule, sa joue droite donne l’illusion d’une larme de cire. Pourtant, son moignon de lèvres sourit immensément. Il parle de ses projets, de ses voyages récents, de sa nouvelle compagne enceinte. Elle porte leur premier enfant. Il est fébrile à l’idée d’acheter des pots de peinture bleue ou rose. Il préfèrerait un pot rose, mais un petit garçon serait aussi un miracle.
Je regarde cet homme, marqué par le feu. Je le regarde vivre, enthousiaste et gai. Je ne comprends pas. Quelque chose m’échappe. Il quitte le cabinet. Le bon docteur Octopus Quichotte se tourne vers moi :
– Devine comment il s’est fait ça !
Ça : litote informelle pour désigner la transfiguration du corps sain en coulée de lave.
– Il y a quatre ans, il a mis de l’essence dans l’habitacle de sa voiture et a foncé contre un mur. Il voulait mourir. »

Mme Didon m’écoute.
– Quand j’ai vu cet homme, il était heureux.
Je n’ajoute rien. Je soulève mon coude du comptoir et ne paie pas ma consommation. Je recule mon tabouret et quitte le « Café Maxence, café de la dernière chance » en plantant là une serveuse aux grands yeux tristes.
Je n’ai pas grand-chose dans la vie, mais j’ai des histoires. Je rencontre des gens couchés ou en fauteuil roulant, des existences qui interrogent mon humanité. Je ne suis pas égoïste : ces questions, je les partage avec d’autres patients. Je tricote entre elles des destinées humaines.

(FAYARD© Tous droits réservés.)

Salut à tous ! Comme vous voyez, la traduction italienne est bien avancée (“La vie n’est pas grave” magnifique titre pour le roman !), pour une sortie dans quelques semaines au pays de Dante ! Suivront Japon, Espagne, Allemagne, Russie, Taïwan, Suède, Pologne, Corée, etc. (Cet aparté est pour ceux qui me suivent depuis le début et font partie de l’aventure !)
J’ai encore reçu des demandes d’éclaircissements à propos du livre.
Il s’agit d’un vrai livre avec une vraie trame narrative où j’ai intégré les meilleures anecdotes du blog et les meilleures anecdotes (selon moi) non publiées sur le blog (et donc inédites). Je vous ai donné la première page du livre, parce qu’un exemple vaut mieux qu’un long discours etc…
Le roman est disponible ici : LIVRE

Chez votre libraire ce serait mille fois mieux ! Je kiffe les libraires ! En plus, avec un peu de chance, le vôtre est un(e) grand(e) suédois(e) blond(e) célibataire qui vient de se faire larguer… (Riez pas, ça m’est arrivé !).

Une femme française.

Photo Duy Ha Min, styliste : DROOPS CREATION, artiste que je ne saurais trop vous conseiller de découvrir si vous aimez la mode et le stylisme. Ce styliste a de l’or entre les doigts !

Alors voilà, elle est entrée avec ses rides et son manteau. Elle a mis un sourire sur les premières, s’est débarrassé du deuxième.
Elle a dit bonjour et sa poignée de main était ferme, engageante.
Avant, elle a retiré son gant, doigt après doigt, comme ces femmes dans un film en noir et blanc. D’ailleurs, son foulard était comme ça : noir, blanc et serré.
Elle a reculé la chaise sans faire de bruit, s’est assise.
Je me suis senti obligé de m’excuser pour mon retard. Elle a dit “Vous avez une jolie montre, mais moi j’ai le temps.”
Le ton de sa voix était calme, posé. Elle a expliqué pourquoi elle venait et s’est laissé examiner avec une confiance totale.
Quand j’ai énoncé le plan de traitement que je souhaitais mettre en place, elle a hoché la tête :
– Essayons ça !
Puis elle a sorti son chéquier. J’ai demandé si elle avait une carte vitale.
– Oui, mais ce n’est pas la peine.
– Mais… Vous ne serez pas remboursée !
Elle a souri :
– J’ai les moyens de payer. Je préfère que les 23 euros de ma consultation aillent à quelqu’un qui ne le peut pas. C’est à ça que sert la Sécurité Sociale, non ?
– Vous êtes sûre ?
Elle a été catégorique.
(J’ai mis des majuscules à Sécurité Sociale : à sa façon de le prononcer, ça avait l’air d’être quelque chose d’important pour elle.)
Entre nous, je dois vous confier quelque chose : j’ai pensé très fort que c’était une caméra cachée ou un poisson d’avril (quand tu les fais en février, tu attrapes beaucoup plus de monde…).
Elle s’est levée, m’a serré la main, a remis ses gants, lissant l’espace entre ses doigts l’un après l’autre, a rapproché la chaise du bureau -sans faire de bruit.
Il y a, dans toute véritable élégance, une autorité naturelle évidente : je lui ai remis son manteau. Je ne me suis pas dit que j’avais l’air d’un serveur du Fouquet’s en train de rhabiller Nadine de Rothschild.
Ça m’a paru… normal.

La suite ?
Elle est partie en disant merci.
La classe existe encore, je veux dire : la classe existe encore vraiment.

La véritable élégance consiste à ne pas se faire remarquer.
George Brummell

Nota : je serai à Bordeaux à la librairie Mollat (avoir Mollat pour son premier roman, c’est comme être baptisé à Saint Pierre de Rome !) à 18 h ce jeudi 20 février pour une rencontre/conférence/dédicace autour de mon LIVRE !
La bise…

Mais où est Charlie ? DTC ! (Épisode 2)

“Les choses qui ne se font pas (ou mal)”, épisode I.

[ VOUS ARRIVEZ À LA FIN DE L’HISTOIRE, LE DÉBUT C’ÉTAIT JUSTE AVANT (EN DESSOUS) ]

Bis repetita : il y a des choses qui ne se font pas. On a tous été jeune.
Personnellement, je n’ai rien contre les tampons hygiéniques (1), mais s’enfoncer un, deux puis trois tampons hygiéniques imbibés de vodka dans les fesses pour que l’alcool traverse la muqueuse et fasse planer plus vite, ça, mesdames et messieurs, c’est une chose que même dans les pires recoins torturés de ma psyché je n’aurais pu imaginer. Et dieu sait que, comme tout le monde, j’ai mon lot de névroses et de débordements. Mais ça, non, vraiment, ça ne se fait pas.
Il faut surveiller nos gosses : parfois, ils sont VRAIMENT effrayants.
Si vous ne me croyez pas, levez-vous, allez sagement voir votre ado avachi sur le sofa devant “Les Anges de la télé réalité SAISON 16” et demandez lui ce que signifie le titre du post d’aujourd’hui et, plus particulièrement, le “DTC” posé en exergue.
Alors ? N’ai-je pas raison ?

(1) : petit message à l’attention des gens déprimés. Je crois que si on m’avait dit, il y a trois ans, que j’écrirais cette phrase surréaliste ” Personnellement, je n’ai rien contre les tampons hygiéniques” et qu’elle serait lue par des milliers de personnes, j’aurais éclaté de rire. MORALITÉ : personne ne devrait être sûr de ce que lui réserve la vie jusqu’à la dernière seconde du dernier jour de son existence. Personne.
Prenez soin de vous, toujours.
BB.

« La jeunesse montre l’homme comme le matin montre le jour. »
John Milton
Extrait de Paradis retrouvé

« Si l’on veut retrouver sa jeunesse, il suffit d’en répéter les erreurs. »
Oscar Wilde

Qu’importe le tampon, pourvu qu’on ait l’ivresse !
Daniele

Mais où est Charlie ? DTC ! (Épisode 1)

Photo : Le génialissime site : Laissez Parler Les Petits Papiers

Dans la série : “Les choses qui ne se font pas (ou mal)”, épisode I.

L’histoire (pour une fois soumise à caution car cela me parait hautement improbable, plutôt une légende urbaine qu’une réalité hospitalière…) c’est François, l’écriture c’est moi !

Alors voilà Charlie, vous savez, Charlie des livres “Mais où est Charlie ?”, le petit bonhomme habillé avec un pantalon bleu et un bonnet rouge. Charlie est un peu con-con : il est toujours perdu au milieu d’une foule et le but du jeu est de le retrouver le plus vite possible.
La dernière fois, je gardais ma nièce.
6 ans, la peau très noire, les dents tres blanches et tellement d’énergie qu’on croirait un oréo monté sur transistor et lâché du haut d’une pente.
J’étais un peu fatigué de lui courir après. Alors j’ai pris une photo de “Mais où est Charlie ?”, j’ai supprimé Charlie avec Photoshop et je lui ai donné :
– Tiens ma chérie, cherche.
Elle a cherché… pendant LONGTEMPS. J’étais, enfin, tranquille.
Ça ne se fait pas. Il y a plein de choses qui ne se font pas.
Exemple :
Quand Jackie arrive aux urgences complètement ivre, on peut mettre son ivresse sur le compte de l’adolescence. On a tous été jeune.
L’interne François :
– Tu as bu quoi ?
– Rien du tout ! répond Jackie en hoquetant.
– Tu as quand même 2 g à la prise de sang !
– C’est pas que j’ai beaucoup bu, c’est que mon pote il m’a dit de faire un truc pour que ça monte plus vite.
– Faire quoi ?
Le jeune se tortille.
– C’est un peu gênant…
– Dis-moi.
– Zêtes sûr ? Le dites pas à mes parents, c’est trop la honte !

[…]

LA SUITE (INCROYABLE) CETTE SEMAINE !

PS : je serai à Bordeaux chez Mollat le jeudi 20 février à 18 heures. Le salon du LIVRE de Paris et d’Arcachon m’ouvrent leurs portes, je vous tiens au courant…
PS 2 : les traductions du LIVRE à l’étranger avancent, l’Italie ouvre le bal pour une sortie très bientôt !

Memento Mori

L’histoire c’est Docteur O., l’écriture c’est moi. Juste merci !

Alors voilà, Docteur O. est entré dans la chambre de ce patient. Il ne se souvient plus de son nom. Juste une chose : d’habitude, dans cette chambre, on rit. Une manière comme une autre pour le patient d’éloigner la maladie. C’est potache, ça ne vole pas haut, mais on se marre bien.
Là, le malade est blême. Il accueille Docteur O. en désignant la fenêtre :
– Il y avait un moucheron. Il s’est empêtré dans une toile. Je l’ai regardé, il s’agitait en tout sens et plus il s’agitait, plus il s’empêtrait. À 14 heures 31 minutes, il a cessé de se débattre. Je pense qu’il est mort, mais il est trop petit pour qu’on voie ses yeux.
Le patient parlait encore et encore. Il était intarissable sur les soubresauts de la bête. Sans méchanceté ou attrait morbide, non. Juste une sorte de curiosité naturaliste.
Il y avait quelque chose, dans ce moucheron en train de mourir. Ça lui a paru important. Suffisamment pour qu’il note l’heure de sa mort, suffisamment pour qu’il en parle…
Quand Docteur O. a pu en placer une, il lui a annoncé les très, très, très bons résultats de ses analyses. L’homme allongé a paru immensément soulagé et a arrêté de parler de la lente agonie qui s’était jouée au bord de sa fenêtre.
Docteur O. se souvient distinctement de la scène. D’abord à cause de cette histoire de moucheron, en plein bal mortifère, ensuite parce que ce n’est pas si fréquent d’annoncer de bonnes nouvelles.
Après, ils ont parlé de tout et de rien, le doc avait assez de temps pour en perdre un peu. Puis ils ont fait comme d’habitude, ils ont vraiment ri.
Mais c’était différent : ” je crois que lui et moi on pensait à la pauvre bête. Enfin, lui seulement. Moi, je pensais à mon patient et à ce qu’il avait bien pu voir dans cet insecte. Avant que j’amène la bonne nouvelle sur un plateau.”

“Memento mori”
Locution latine.

“YOLO !”
La même chose, mais chez les jeunes.

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La magie de Noël

L’histoire c’est B. médecin, l’écriture c’est moi ! Mais c’est écrit en urgence…

Alors voilà mademoiselle Lapin, veille de Noël, qui cumule un peu les emmerdes.
Elle travaillait ce matin quand un jet de soude caustique a décrit une courbe dans les airs pour s’échouer droit dans son œil. La moitié du visage gros comme une patate, elle consulte un ophtalmo en urgence. Elle a perdu la moitié de son acuité visuelle :
– Il m’a dit que ça reviendrait, la cornée n’est pas touchée.
Elle a attendu 4 heures l’ophtalmologue qui ne lui a pas fait d’arrêt de travail “parce que le médecin traitant pourra vous le faire”, puis elle vient s’échouer dans la salle d’attente de B. où elle a attendu encore une bonne heure.
– Comment ça va ? demande B. avec sollicitude.
Elle hausse les épaules.
B. a l’impression qu’elle pleure un peu. Comme il ignore si c’est l’acide ou le cœur, il regarde l’œil sain. Celui-ci pleure aussi. Merde, c’est le cœur !
– Qu’est-ce que tu vas faire ce soir ?
– Je viens de Bretagne. Toute ma famille et mes amis sont là-bas. Les quelques personnes que j’ai rencontrées sur la région travaillent ce soir. Je suis toute seule.
Elle hausse les épaules. Son air est si pitoyable que, si elle épluchait un oignon, c’est lui qui se mettrait à pleurer :
– Je vais rentrer et louer un film.
B. pense à sa famille, les treize personnes qu’il aime et qui l’attendent à la maison, alors il lui dit :
– Ah, mais non, c’est pas possible ça ! Faut que tu trouves quelqu’un, quelque chose à faire, des gens, un ami. C’est Noël ! C’est sacré Noël ! C’est SACRÉ !!!!
Elle le regarde et lâche avec une simplicité magnifique :
– Vous avez raison, je vais me trouver un plan cul.

On ne peut rien contre la magie de Noël, je veux dire : on ne peut vraiment rien contre la magie de Noël.

« Noël au balcon, enrhumé comme un con »
Mamie

« Il y a quatre âges dans la vie de l’homme : – celui où il croit au père Noël ; – celui où il ne croit plus au père Noël ; – celui où il est le père Noël ; – celui où il ressemble au père Noël. »
Lao-Tseu (ou Confucius. Ou mon grand-père, je ne sais plus lequel des trois a dit ça…)

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