(Photo : moi quand j’entends le gouvernement dire que tout est fait pour améliorer les conditions de travail à l’hôpital)
.
.
.
Alors voilà, on en parle peu et je ne sais pas si vous le savez mais les services des Urgences de plusieurs hôpitaux entrent en grève : en plus de Nantes qui rejoint les 17 services d’Urgences Parisiens, Mantes la Jolie, Valence, et Croix-rousse rejoignent le mouvement et ça me touche en tant que docteur, mais en tant que romancier aussi, puisque c’est dans un service d’urgence que se déroulait l’intrigue de mon premier roman.
Interne, j’ai beaucoup travaillé aux urgences et j’adorais ça. Parce que les services d’Urgences, c’est de l’humanité en boîte, du beau du bon du sale du violent du triste du joyeux, serrés comme des sardines, du jus de condition humaine concentré.
Pourquoi ne pas avoir voulu y travailler alors ?
Car un jour, je suis tout jeune soignant, et plein d’illusions, alors que je suis de garde, je m’occupe d’une ravissante patiente de 86 ans, qui doit être hospitalisée.
Élise, elle s’appelle.
Et vous savez, aux Urgences on passe presque autant de temps à examiner des malades qu’à se débrouiller pour leur trouver une chambre dans les services surchargés. Élise, 86 ans, attend sur un brancard que je lui trouve un vrai lit. Elle a attendu 6 heures.
6 heures !!!
Oui, oui. Moi je bataille comme jamais au téléphone pour elle et je la regarde, Élise. Seule, angoissée, incapable de trouver une position confortable. Et je me dis « avec son dos, un brancard… quand même ! ». Finalement, on m’appelle : « Baptiste c’est bon, il y a eu un décès dans le service, et du coup une place s’est libérée ! » et là, je me souviens parfaitement m’être exclamé « SUPER !!!! » et m’être sincèrement réjoui : eh quoi, je viens enfin lui trouver un vrai lit ! Une vraie chambre ! Pas un couloir où circulent tellement de monde qu’elle est incapable de dormir…
Et puis je me rends compte que derrière mon « SUPER » si enthousiaste, il y a un être humain qui est mort, qui a « libéré la place ».
Et je quitte l’hôpital ce jour-là en me disant que je veux soigner, moi. Pas jouer aux chaises musicales avec les vivants et les morts. Et que plus jamais je ne veux me réjouir de la mort de quelqu’un : car ce n’est pas pour cela qu’on devient soignant. Non, non, et non : ce n’est pas pour cela.
Alors je ne suis pas politicien, je n’ai aucune idée de comment améliorer les choses. Mon travail, c’est essayer de soigner. Et quand on le fait mal, ou sous pression, ça amène à des erreurs et des absurdités, comme un jeune médecin qui aurait rêvé d’être urgentiste, mais qui a dû sacrifier cette vocation-là à cause de cette poudrière hospitalière où nous sommes censés incarner un certain idéal de vocation, d’humanité et de civilisation.
——
Je serai mercredi 22 mai à Lyon, Comédie de L’Odéon, à 20h15, après la représentation de la pièce de théâtre adaptée de mon premier roman, pour une dédicace.
Venez !
Vive la dissonance cognitive… ou comment on en vient à se réjouir involontairement de choses que l’on a tout fait pour empêcher.
Espérons que ces grèves portent leurs fruits et qu’enfin, les “puissants” comprennent à quel point l’Humain est important.
ps: je suis jalouse des lyonnais.
Occupées á parler des élections européennes ( et c’est normal) ou du royal baby ( dont on se fiche ) les médias ne parlent pas de ces grèves qui ne perturbent pas la vie des gens, car les soins sont assurés et le public n’est pas ” pris en otage” comme aiment le répéter les journaux quand il s’agit de la Sncf ou des éboueurs… Désespérant!
Ton “super”, c’était d’avoir enfin trouvé le lit.
Le prix payé pour ce lit t’est revenu en plein cœur, mais qu’y pouvais-tu ? Tu ne t’es pas “réjoui “ de la mort d’un autre, même si c’est ce que tu as pensé après s coup.
Tu es un soignant, pas un comptable.
Nos ministres intègres-c’est pas moi qui ai écrit cet oxymore- ne prennent la véritable mesure de la condition des urgences et de l’hôpital que lorsqu’ils y sont confrontés comme simples patients, et non comme ministres en
Et c’est vrai qu’il faudrait davantage de couverture médiatique pour ce mouvement de grève, avec sujets de fond pour que la population soutienne à fond le personnel soignant à bout de force.
Ministres en exercice.
Bonjour Baptiste. Je crois qu’une immersion de quelques heures de nos ministres aux urgences leur feraient prendre la mesure de l’urgence de s’occuper des urgences ! Tant qu’ils n’auront pas fait l’expérience eux-mêmes en tant que citoyens.nes, ils ne seront pas comment fonctionnent les urgences. Laissons-les sur un brancard 6 heures d’affilées pour voir comment ils vont se comporter. Expérimenter permet, je crois, de prendre ensuite de meilleures décisions, sinon cela reste abstrait et ils ne se sentent pas concernés. Merci pour vos billets de vie, d’humanité, de sincérité.
Pas possible ils ont leur service spécial es ministre, le Val de Grâce ( quant t’y penses, sérieux, déjà le nom c’est s^r que tu seras pas sur un brancard des heures à côté d’un mort vivant ramassé dans le caniveau et qui sent toutes ses miseres)
Remenber ! la gastro du fils ”de” rapatriement sanitaire avec avion de la présidence,
nous vivons tous simultanement sur Terre mais définitivement dans des mondes parralleles.
Parfois passent des infos de l’un vers l’autre et bim scandale! Scandale dont l’ampleur est mesurée à sa durée de visibilité sur les réseaux a-sociaux .
Les urgences course des miracles marathon ultime
Là j’ai une grosse pensée pour ma généraliste en burn-out, ma dentiste on vend tout on part faire de l’humanitaire, à ce médecin qui faisait très bien de la chirurgie a Mayotte et se retrouve médecin du travail en metropole.
La Terre plusieurs mondes
A tutti
…Les vieux (de l’ephad) sont très souvent envoyés aux urgences, surtout le week end ; en général pour chute, déshydratation, ou constipation
Les urgences sont un monde de science fiction où même un individu jeune et conscient se sent une misérable chose. Le vieux déjà désorienté se trouve dépiauté en un tournemain, puis déposé nu sur un chariot sous un drap avec des aiguilles plantées dans ses pauvres veines ( Ah zut, dit l’apprentie perforeuse, j’ai pété la veine, ah zut, celle là aussi, je vais essayer l’autre bras, ah zut.. Latifa, tu pourrais venir, ste-plait ?). Là il attend des heures sous une lumière violente qu’il se passe quelque chose, dans le bruit, l’agitation, il n’y comprend rien. Possible qu’il se croie déjà en enfer.
La vieille dame a été envoyée là pour cause de constipation, elle subit tout cela pendant 7 heures. Je demande 3 fois si elle peut avoir pour elle un verre d’eau. Ce n’est pas possible, et il n’y a pas de distributeur dans le service.
En soirée, l’interne fait son compte rendu. Elle n’a rien. Il ajoute sévèrement : il faut veiller à ce qu’elle boive. (extrait de “secouer le cocotier ” http://eperluette.over-blog.com/article-secouer-le-cocotier-42599147.html )
Ces ministres qui depuis 20 ans nous bassinent qu’il faut supprimer des lits, d’autres qui ne veulent remplacer qu’un fonctionnaire sur deux…
A quand un tribunal de l’incompétence ?
Il existe : c’est le vote “un homme une voix”
le problème : l’abstention
la solution : un vrai VCP inspiré de la Suisse
J’etais a la representation d’hier. Un grand moment d’emotion ! Astucieuse mise en scene (on se prend reellement d’empathie pour la patiente de la chambre 7) et excellent acteur. Bravo!
“Et je quitte l’hôpital ce jour-là en me disant que je veux soigner, moi. Pas jouer aux chaises musicales avec les vivants et les morts. ” Une phrase comme un coup de poing à l’estomac. Merci Baptiste.
Bonjour
Comme quand tu es enseignant et que tu cries : “Super !” lorsqu’on t’appelle en direct du tribunal pour t’annoncer que, dès le soir même, 3 de tes élèves (enfin, pas tous dans ma classe tout de même), que cette fratrie donc va être placée pour cause de graves carences éducatives … Pas seulement des poux depuis 5 ans -non stop-, ni du serumen dans les oreilles, ni les ongles sales … Moi non plus, je ne suis pas politique et j’ai choisi ce boulot pour enseigner …
Pfff !!! Quelle société ! Travailler plus pour gagner plus. L’humanité ne trouve plus sa place. Ceux qui sont en haut de la pyramide dans leurs salons couverts d’or ne peuvent même pas comprendre, c’est leur tête qui parle mais leur cœur….
L’hôpital est malade et c’est bien dommage mais les services hospitaliers français, malgré tous leurs défauts ont un avantage certain sur celui d’autres pays : ils existent, ce qui n’est pas le cas de partout ! Il y a bien des lieux où on vous demande de payer à l’entrée ! Et ce serait peut-être une voie à envisager pour désencombrer les urgences de certaines personnes qui n’y viennent que parce que c’est plus facile que d’aller prendre un rendez vous chez un médecin de ville !
Tous mes voeux de réussite à ce personnel hospitalier en grève !
Comment on obtient une place en maison de retraite? Grace au décès d’un resident… “génial “c’est ce que j’ai dit quand enfin ils ont pu prendre mon père atteint d’Alzheimer et qui avait fugué peu de temps avant, nous laissant dans le désespoir (merci aux gendarmes et policiers qui nous ont aidés et soutenus a l’époque).
Je n’ai pas honte de l’avoir pensé et dit…
Quand mon père a fait le grand voyage sans retour, il a laissé la place à un autre résident…c’est la vie…c’est la mort..
Tout est dit ☹️☹️☹️☹️☹️
reste à l’expliquer !
Les urgences c’est une vraie cour des miracles ! Les patients attendent LE miracle et les soignants, pompiers, etc… en font à tour de bras des miracles… et tout ça sans moyens… Bravo et chapeau à tous !!!
Et merci pour votre article Baptiste ; )
J’avais écrit ça en novembre 2017 “https://leblogdeblanche.wordpress.com/2017/11/26/urgences/”, mon frère est resté 30 heures aux urgences, et je n’ai pas envie de dire “qui dit mieux”. Il n’a pas gardé de rancune envers l’hôpital de cette ville, son bon caractère lui a permis de voir en cette expérience l’occasion de côtoyer de jolies et gentilles infirmières/aides soignantes.
Moi, au vu de cette expérience, que je n’ai vécu que par procuration, je soutiens tous les grévistes et quand on parle nouvelles restructurations dans l’hôpital de la ville la plus proche de chez moi, je n’ai qu’un souhait : ne jamais avoir à y aller.
Toutes les occasions sont bonnes pour redire quelques réalités humaines fondamentales.
Le constat de Bibi est pertinent; il fait écho à bien des penseurs du siècle des Lumières et de la Révolution de 89.
J’explique parfois à de jeunes détracteurs la différence entre gauche et droite; humanisme et capitalisme.
Passé la sidération pavlovienne créée par les mots avilis par les pouvoirs, nous pouvons parler sereinement. Les mots viennent de la position des représentants du Peuple dans l’hémicycle parlementaire. Ces situations regroupaient des citoyens aux idées proches. Ces convictions ont été entretenues par les penseurs et philosophes et perdurent de nos jours.
Le principe “de droite” est le suivant : considérons deux individus nés à la même date et suivons les dans leur existence; le plus fort, le plus doué, le plus prédateur sera factuellement supérieur au second, moins nanti. Tout doit être entrepris pour favoriser le premier. Le second devra se contenter du ruissellement engendré par le sillage du premier; si tant est qu’il en produise. La société produit, distingue et choisit ses sociétaires. Théorie de l’élitisme social. L’élite possède et exerce le pouvoir sur la nation par évidente reconnaissance de ses capacités à pérenniser les principes élitistes au sein d’un milieu conservateur restreint.
Le principe “de gauche” est différent, sinon opposé. Les deux nouveaux nés sont considérés, socialement, comme étant égaux. En droits puis, plus tard, par ajout, en devoirs. Ainsi, les capacités personnelles sont-elles banalisées au profit d’un individu citoyen, différent des autres membre de la société. Cette différence est reconnue, non hiérarchisée, s’exprime par le vote démocratique (un homme = une voix) à l’intérieur d’un système social commun : la République. Les droits et devoirs communs à chaque citoyen sont notables en référence à des proclamations admises par le Peuple : la Constitution, qui est le socle commun justifiant la raison de vivre ensemble comme son nom l’indique; les lois, qui sont en principe des textes contraignants règlant les litiges; les règlements qui donnent la conduite à suivre pour respecter le principe constitutionnel fondamental : les Droits de l’Homme et du Citoyen. enfin, les codes (civil, pénal, du travail, etc.). Ainsi, l’individu est-il redevable à la Nation. On constate des dérives vers la droite quand la république fait voter des lois à portée préventive, préjugeant ainsi des conduites délictueuses de ses citoyens avant même qu’ils soient exécutés ou pensés. La gauche ne peut exister que par la pratique de la “révolution permanente” -intellectuelle et laborieuse, évidemment- sans violences.
L’humanisme révolutionnaire (au sens de la Révolution de 89-91) s’est affiné au cours du temps historique. Depuis la Grèce antique jusqu’à nos jours, à travers les sociétés parlementaires ou les dialogues sur les agoras, sous les arbres des griots, dans les plaines d’Europe du Nord ou dans les salles de réunions. En 89-91, il reprend les idées jacobines en les peaufinant: reconnaissance et mise en valeur des capacités de chaque individu dans un but à la fois d’amélioration des conditions d’existence de lui-même, de son entourage et, par contagion, de la société elle-même toute entière. Ainsi, considérée à un instant donné, la Nation accomplie serait le portrait le plus juste de l’ensemble de ses citoyens en phase d’amélioration. Cette idée a été proposée en assemblée vers l’année 90 mais n’a pas été mise en pratique. (j’ai oublié le nom du déclarant)
En résumé, la droite est omnisciente et omnipotente par principe; se réfère à une vérité extérieure évidente pour légitimer son pouvoir. La gauche est un paradigme fondé sur la révolution permanente pacifique démocratique. L’humanisme tend à instaurer la reconnaissance d’un sens de l’existence humaine fondée sur la connaissance de l’humain dans le but d’atteindre le mieux être; peut-être même le bonheur.
La société dans laquelle nous vivons est en voie de faillite avant dépose de bilan. En effet, elle présente les symptômes d’une fin de règne relativement proche, inéluctable. La société rurale est quasi achevée selon le même schéma que l’on a pu constater au sujet du nomadisme. La société industrielle de transformation s’éteint par plaques comme se désagrègent les glaciers dans la mer; voir la sidérurgie. L’industrie de fabrications de biens de consommations est en passe de mourir d’apoplexie. Les sociétés fondées sur l’esprit deviennent peu à peu incroyables. Et, puisqu’il s’agit d’humanité et que dieu es mort avant que d’avoir existé vraiment, force est de constater que l’espèce humaine est face à elle-même; dans l’incapacité quasi absolue de trouver la commande “reset” pour elle-même. L’intelligence créative, cet atout extraordinaire de l’humain, est incapable de remettre en question le paradigme impérialiste élitiste dans lequel elle s’est engagée corps et âme, par ses propres moyens.
La non-reconnaissance des capacités de chacun, l’encouragement de ces dons et l’exploitation de ces caractéristiques au profit de tous nous amène à ne pas comprendre l’à venir cosmique cosmique de notre planète; encore moins à savoir comment s’y adapter. Parce que nous ne savons pas ce que nous sommes capables de ne pas faire. Alors que nous possédons tout pour agir et progresser. Nous ne savons pas comment nous adapter à nous mêmes. Toutes les affirmations sont mensongères, cosmétiques ou fallacieuses: la richesse, le pouvoir, la certitude, le rejet du doute, le refuge dans la procrastination, la foi dans le hasard et le temps qui passe, le renoncement.
En ne disposant pas de lit pour soulager une vielle patiente hospitaliser, la société humaine va dans le mur. Tout est lié; de manière plus ou moins évidente; de manière pus ou moins directe. Mais avec discernement, nous pouvons voir les liens subtils ou aveuglants selon les cas, qui fabriquent notre destin commun. Je reviens à cette phrase usée jusqu’à la plaie : “Changer le pansement ou penser le changement?”.
Bibi se voit obligé de rompre sa vocation par la société du fric et de l’élitisme. Celle-là même qui remplace peu à peu les soignants par les actionnaires des conseils d’administrations des hôpitaux. Et les serviteurs administratifs qui rappellent chez elles les infirmières qui viennent juste de rentrer, crevées, après un dépassement d’horaire; au nom de la rentabilité.
Mais, après tout, comme je le lis dans les commentaires: un mort et c’est une place libre. C’est la vie.
Vraiment ?
Que Mieux nous inspire tous dans ce moment de gousse creuse
La situation actuelle est tellement atroce. Autant du côté des patients que des soignants. Entendre mon amie infirmière me parler de ses conditions de travail me fend le coeur. Elle qui avait cette vocation le vit comme une difficulté et songe à se réorienter. Quelle tristesse pour toutes et tous.
Il faudrait, un jour, qu’une personne hôôôôte placée subisse les désagréments des réductions d’effectifs pour que les décideurs se rendent compte de l’atrocité de la situation ?