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Ma petite boîte à outil

Petite leçon de vie venant d’une sage-femme !
Alors voilà, en tant que sage-femme, je me dois de me former régulièrement.
Or, il y a 3 ans, j’ai entrepris une formation en accompagnement émotionnel, avec une sage-femme : Ariane Seccia.
Cette formation a changé ma pratique auprès de mes patientes, et plus largement ma vie…
À ce point !
En trois mots, j’y ai appris que bébé, on se construit sur les bases du contexte dans lequel on arrive. Vous, moi, tous les bébés. Grossesse désirée ou bébé « ohlala ! » ? Bébé fille : après trois grandes sœurs ou après trois grands frères ? On se construit aussi sur les cartons familiaux (pas ceux des déménagements, ceux qui percutent – Bim !), sur plusieurs générations.
À partir de 2 ans environ, notre mental prend les rennes et met en place des stratégies de survie pour ne pas revivre les mêmes impactages émotionnels (ceux qui étaient dans les cartons). Le perfectionnisme en est une : « Je fais tout parfait, tout bien, rien qui dépasse, comme ça, on m’aimera… ».
Ça vous parle ? Je sens que oui…
Si vous saviez le nombre de perfectionnistes qui peuplent cette terre …
Mais, ce n’est pas le tout de comprendre d’où l’on vient et pourquoi le mental fonctionne ainsi. L’idée, c’est quand même d’arrêter de se prendre la tête.
C’est là que j’en arrive à ma petite boîte à outils. Oh, ce sont des petites phrases de rien du tout, mais remises dans leur contexte, elles fonctionnent comme des mantras, capables de tordre le cou à ce p…. de mental qui nous pourrit la vie avec ses stratégies de survie.
Le plus universel ?
« Je fais de mon mieux, dans le respect de moi-même, avec les cartes de l’instant, le reste appartient à la vie ».
Hein que ça ressemble à des petites phrases de rien du tout, mais quand vous faites de votre mieux, TOUT EN VOUS RESPECTANT (c’est là que tout se joue), avec le contexte dans lequel vous êtes, eh bien, vous lâchez toute culpabilité, toute pression, toute peur de mal faire puisque vous faites de votre mieux, et que le reste appartient à la vie.
Il y en a un que j’aime bien aussi : « Et alors ? ».
Vous êtes épuisé, vous vous affalez dans le canapé (respect de vous-même ! ) au lieu d’affronter votre table à repasser, et votre ado part au lycée le lendemain avec un T-Shirt chiffonné.
Et alors ?
Ben alors rien…
Ah si, les gens vont penser du mal de vous (même pas sûr)…
Et alors ?
Ben alors toujours rien…
Si les gens pensent du mal de vous, il y a un autre outil intéressant : « Le mode grillage ». Imaginer qu’on est un morceau de grillage et que tout jugement vous passe au travers sans même vous faire plier…

Je suis tellement étonnée des bienfaits de ces petits outils que j’en ai une boîte complète dans mon sac à main (de l’avantage d’être une femme), pour les distribuer autour de moi, dès que quelqu’un que je croise a le cœur qui vrille à cause d’un mental en mode survie.
Du coup, avec ma double nationalité « sage-femme / romancière », j’ai également décidé de saupoudrer mes romans de quelques outils, comme ça, l’air de rien, puisque mes personnages, aussi réels que dans la vraie vie ont un mental tout pareil que nous…
Et figurez-vous que ça leur fait du bien aussi, à mes personnages

Alors, si je n’avais qu’une chose à vous dire, c’est de faire de votre mieux en prenant soin de vous respecter, et si ça ne convient pas aux autres, mettez vous en mode grillage et dites-vous « Et alors ? », au fond de vous, tout au fond de vous, en cachette de votre mental…
Le reste appartient à la vie…
Agnès Ledig

[Agnès Ledig est sage-femme et écrivain. Ses livres s’arrachent comme des petits pains (Prix maison de la presse il y a deux ans !) et c’est un honneur pour moi qu’elle publie dans mes colonnes. Ses deux derniers livres sont sortis ce mois-ci. « Pars avec lui » et « 13 à table » qui est un recueil de nouvelles dont les recettes iront aux Restos du cœur. Merci à elle de participer à une meilleure compréhension entre le monde des soignants et le monde des soignés !]

Pourquoi les médecins ont parfois besoin de réconciliation.

L’histoire c’est J., médecin généraliste, l’écriture c’est moi. Merci ! (ou pas…)

Alors voilà une famille tout ce qu’il y a de plus normal : un papa, une maman, une petite fille de cinq ans qui s’appelle Candie et un autre bébé en route. La petite maison dans la prairie, sans les bûches, et sans la prairie.
J. (comme “Jeune médecin plein d’illusions sur le genre humain”) suit la grossesse de la maman, et tout se présente bien.
En effet, Monsieur prend soin de Madame, Candie a l’air très heureuse et “tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes”, comme écrirait ce bon vieux blasphémateur de Voltaire.
[Vous sentez venir le truc ?]
– On peint la nouvelle chambre, dit madame C. Du bleu, parce que ce sera un petit gars, j’en suis sûre.
[…]
Quelque jours plus tard, la journée est passée vite, J. a encore plein de patients dans la tête, quand Monsieur C. débarque.
Sans rendez-vous, et sans gêne.
[…]
Il sort un petit papier de sa poche, le déplie devant le médecin en détaillant les douleurs/rougeurs/gonflements qui le démange au niveau du pénis [j’ai cherché un autre mot, mais rien n’est venu. Un pénis, c’est un pénis. Point final. Si vous avez des expressions inédites, je suis preneur !…]
– Peut-être que c’est le type de Vincennes, ou celui de Cluny.
– Vous avez beaucoup de rapports ?
– Ben oui. Ma femme est enceinte, alors…
– Avec des hommes ?
– Ben oui.
Et monsieur de détailler ce qu’il fait, comment il le fait, combien de temps il le fait et avec qui il le fait, car Monsieur C., est un peu exhibitionniste.
Tout ça ne dure que 15 minutes, mais tout ça se fait en fixant J. droit dans les yeux, le mettant très mal à l’aise. Manifestement, Monsieur C. se régale de son effet sur le bon petit doc’.
Enfin, monsieur C. réclame les tests de dépistages usuels.
Oui, il est inquiet.
Non il ne se protège pas.
Et non, il ne dira rien à sa femme.
Ça fait beaucoup de mensonges (et beaucoup de vernis…)

Ce soir-là, c’est le docteur J. qui aurait bien eu besoin d’une petite réconciliation…

(un jour, je vous ferai un post sur la difficulté de respecter le secret médical dans certains cas… vous comprendrez combien on peut se sentir parfois très isolé et très seul face à certaines situations… Pour la photo, je vous laisse deviner ce qui cloche ! )

Merci les amis !

Alors voila,

Voilà plus d’un an que vous suivez mes petites histoires à l’hôpital. Vous m’avez connu interne, puis en train de préparer ma thèse, lorsque mon premier livre est sorti en librairie, lorsque j’ai passé ma thèse, lorsque le livre a été traduit dans tous ces pays étrangers, lorsque j’ai eu des doutes, lorsque j’ai été agressé au cabinet, vous m’avez accompagné. Hier, j’ai reçu mon écusson de médecin généraliste.
C’est un peu mon cadeau de Noël avant l’heure, merci à tous de me l’avoir envoyé,
Prenez soin de vous,

Baptiste Beaulieu.
PS : oui, je me ronge les ongles… Si vous avez des astuces pour arrêter !

La réalité des choses.

L’histoire c’est VOUS, l’écriture c’est moi ! Merci Raphaëlle ! Cette anecdote est dédiée aux infirmières de pédiatrie qui font un boulot de dingue

Alors voilà, le nourrisson arrive, avec sa mère et sa grand-mère.
Les infirmières l’installent, il est très malade, il faut poser une voie veineuse.
Le “petit-tout” est un “tout-petit”, et comme souvent chez les tout-petits, ses veines ne sont pas faciles à trouver. Sauf qu’il faut bien la poser, cette voie… Alors les infirmières commencent à chercher, sans patch anesthésiant parce que ça ratatine les veines, parce que ça prend du temps, qu’il y a urgence, que le petit-tout tout-petit est très, très, très malade.
La mère regarde les larmes et la douleur de son petit-tout tout-petit. Elle lui parle, elle lui caresse le front, elle est là… Au bout de 5 minutes, pas une veine qui tienne, les infirmières essaient l’autre main, puis le pied, puis l’autre pied…
10 minutes passent…
Pas de veine… Le cœur de la mère se casse.
15 minutes…
Parce que la mère est une mère, c’en est trop pour elle. La-voilà qui sort de la pièce, et éclate en sanglots. Elle passe le relais à la grand-mère.
20 minutes…
Parce que la grand-mère est une grand-mère, celle-ci ne tient pas plus d’une minute. Elles échangent de nouveau leurs places…
35 minutes…
Toujours pas de veine. Les infirmières, concentrées et professionnelles, envisagent même de piquer sur le front…
40 minutes…
Tout à coup, le miracle !
” Tiens, on va essayer ici, parfois il y a une belle veine !”
Plus de 45 minutes, elles ont trouvé.
Pendant ce temps-là, mère et grand-mère discutent à voix basse dans le couloir. “Enfin ! Non mais c’est pas possible de faire souffrir un petit comme ça ! C’est inacceptable ! ”
À ce moment-là, la porte s’ouvre, les infirmières concentrées et professionnelles sortent, s’assoient à côté de la mère et de la grand-mère, puis elles fondent en larmes avec elles.
Pourquoi ?
Parce que les infirmières sont des êtres humains comme les autres.
” Je leur en ai plus voulu du tout ! Tiens, c’était il y a 7 ans tout pile, et j’en ai encore vraiment les larmes aux yeux…” m’écrit la mère.

Je veux bien la croire, oui, je veux vraiment bien la croire. Parce que les choses sont les choses, même sous les blouses.

Si vous aussi vous voulez raconter votre expérience en tant que soigné et/ou soignant (((((infirmier(e), aide-soignant(e), médecin, diététicien, kiné, tablette de chocolat noisette anti-stress))))) venez en parler ici :

https://www.alorsvoila.com/contact

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Des questions sans réponses…

Alors voilà il était dans son fauteuil, il a voulu manger seul, il n’avait pas l’habitude… La bouchée est passée de travers : il s’est étouffé et il est mort.
Nous sommes arrivés, avec le pimpom rouge et jaune, l’attirail de guerre, etc. On a posé des perfusions, mis des drogues aux noms compliqués dans ses veines. On a enfoncé des tubes dans sa bouche, on a remplacé le mouvement de ses poumons par le cliquetis d’une machine.
Je crois qu’on l’a sauvé, oui, on l’a sauvé. On a été content, il a repris sa vie d’avant. Il était mort et nous l’avons récupéré. On a été content, oui…
[…]
Six mois plus tard. Une garde de nuit à l’hôpital. La mienne. Pas celle d’une co-interne, non, la mienne. Il FALLAIT que cela tombe pendant MA garde, comme un fait exprès. Une drôle de synchronicité.
On m’appelle dans un service.
Le même patient, une autre maladie (oui, oui, il y a des milliers de façons de mourir…) Je fais ce que je peux. Au petit matin, il meurt.

Est-ce ainsi que les Hommes meurent ?
On écrit : “Mort constatée à 6 heures 37”. Et voilà !
Ça parait très facile.

Donc, au petit matin, il meurt.

On me dit, on me répète, les chefs, les uns après les autres, les infirmières aussi (merci Pascaline…), que j’ai fait ce que je devais. Ça ne marche pas. Je me regarde dans le miroir, je me dis que j’ai 27 ans et que c’est un peu jeune pour se sentir coupable d’avoir tué un homme. On est quand même là pour sauver des Vies, non ?
Et puis, que signifie arracher un homme de la Mort un jour, pour se sentir coupable de l’avoir tué le lendemain ? Le Petit Dieu des Internes vous fait de ces blagues ! Ou alors je n’ai vraiment aucun sens de l’humour….

– Qu’est-ce qui est jaune et qui sent la peinture bleue ?
– Un pot de peinture jaune.

D’habitude, cette blague me fait rire. Pas ce matin. Je pense qu’elle a été inventée par le Petit Dieu des Internes. Un mauvais peintre qui n’a aucun humour, non ?

COUCOU, TU VEUX VOIR MON KIKI ?

Alors voilà, je marche dans le couloir de l’hosto quand j’aperçois un vieil homme sur un brancard, le teint livide. Il est tellement pâle qu’en le voyant, plusieurs idées me traversent la tête :
1/ lui cuisiner un steak tartare;
2/ lui faire une intraveineuse de boudin noir,;
3/ lui faire boire un bol de O négatif cul-sec,;
4/ je ne sais pas, mais fais quelque chose, putain de bordel de merde !
Je dis à l’infirmière :
– Qu’est-ce qu’il a le monsieur de la 3 ? Il est plus blanc qu’un patient sous dialyse. On dirait un vendeur dans une épicerie bio !
(C’est vous dire combien il a l’air malade…)
– T’inquiète ! répond-elle, on s’en occupe. Si tu veux te rendre utile, fais-lui un sondage urinaire !
–D’acc o d’acc !
J’entre donc box 3, je me présente, je mets des gants, je soulève le drap, et là… Rien. Pas de pénis. Merde alors !… Pourtant mes cours d’anatomie sont formels : l’appareil reproducteur mâle ( ou pénis ) se situe au milieu et en bas du pubis, juste à côté des testicules que l’on appelle aussi “cerveau” chez l’homme du commun et “Diagonale du vide” chez l’homme politique…
J’appelle l’infirmière :
– Migraine !
[ en réalité, elle s’appelle Irène. Mais on lui a trouvé ce petit surnom charmant parce qu’elle parle très, très, très FORT !… Vous le voyez, aux urgences comme en Corée du Nord, on ne peut rien contre l’humour !]
– Oui, Bibi ?
Moi, chuchotant : ” Le monsieur a pas de kiki.”
– Quoi ? Qu’est-ce que tu dis ?!?
Moi, parlant sur la pointe des pieds (je sais ça n’existe pas cette expression, mais j’ai décidé de l’inventer : ” Parler sur la pointe des pieds “. À croire que j’ai envie de me faire de nouveaux amis, Bernard Pivot et les vendeurs des épiceries bio…). Donc, moi, parlant sur la pointe des pieds : ” Je dis que le Monsieur a pas de kiki…”.
– Mais qu’est-ce que tu racontes ?
– Je raconte que le Monsieur a…
– Oui, oui, j’ai compris. Allons voir ça de plus près !
Elle entre box trois, se présente, met des gants, soulève le drap, fronce les sourcils, se recule, se retrousse les manches, revient sur le patient, relève le drap et fouille dans les poils (désolé pour la précision, mais c’est aussi un peu ça notre métier.)
– Regarde, Bibi, c’est là.
– Ah…
Le vieux monsieur explose de rire :
– Ma femme a eu le même problème pendant 40 ans ! Ça m’a pas empêché de lui faire 4 enfants !
[…]
À la pause, je me souviens, j’ai appelé ma mère.
– Maman ?
– Oui ?
– Tu savais que la taille du pénis serait peut-être liée à l’imprégnation en testostérone de la mère durant la grossesse ? Je viens de me renseigner sur Google.
Silence.
– Heu… non. Pourquoi me dis-tu ça, Baptiste ?
– Pour rien, pour rien.
– Ah bon.
Silence gêné. J’ai pensé au monsieur de la 3.
– Maman ?
– Oui.
– Merci.
– Hein ?
Mais j’avais déjà raccroché, parce qu’aux urgences, on a le temps de rien. Vraiment.

PS 1 : je n’ai rien contre les vendeurs d’épicerie bio. C’est simplement que je tuerais mon chat pour faire un bon mot (même si, nous sommes d’accord, ça ne ferait rire personne. Je le sais, j’ai essayé…).

PS 2 : le PS 1 est une blague, je n’ai pas de chat… J’ai un chien !

PS 3 : sans transition, parce que je ne suis pas un garçon qui tourne autour du pot : si vous aimez cet article ou plus globalement le site en général, partagez sur vos réseaux sociaux et par pigeons voyageurs !

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À ma place ?

Alors voilà Madame Ouija me dit qu’elle va mieux, que son fils est “parti” il y a quatre ans mais qu’elle le sent encore auprès d’elle.
Le matin, quand son mari dort, elle prend un stylo et laisse courir sa main sur le papier.
– C’est mon fils ! Mon fils qui me parle, dit-elle en souriant.
Je ne dis rien, je n’y crois pas, c’est tout. Comme le Père Noël, les sportifs espagnols non dopés, les M&M’s qui ne fondent pas dans la main, ou l’homéopathie ( vaste débat avec mon père qui y croit dur comme fer ! “Mais Baptiste, puisque je te dis qu’on a même soigné le chien avec des granulés, qu’est-ce qu’il te faut de plus ?!?! ” Hum, je sais pas, Papa, des essais cliniques randomisés multicentriques en double aveugle, par exemple ?)
Madame Ouija voit bien que je tique, alors elle farfouille dans son sac et me montre des feuilles. Des dizaines de feuilles. “Son fils” l’y rassure encore et encore, lui dit qu’il va bien et qu’il pense beaucoup à eux. Parfois, ” il ” dessine des animaux, des arbres, des bateaux et des quais de gares… elle serre très fort les feuillets. Ça l’aide, ou ça l’aliène, je ne sais pas.
– Il m’a parlé d’endroits où je ne suis jamais allée, de gens que je ne connaissais pas. C’est bien la preuve que c’est lui ? Non ?
J’esquive la question, je n’ai pas de réponse. Je lui demande comment va son moral. Elle me dit qu’elle va mieux depuis qu’il lui parle, car il lui dit qu’il est très heureux, que l’au-delà est une chose calme et douce, qu’elle ne doit pas avoir peur de la mort, et que tout est bien.
Je regarde les feuilles. Beaucoup d’écriture. J’entraperçois un chat, une maison… Tout est écrit/dessiné avec un trait un peu enfantin. Je suis un scientifique, alors je doute. Mais je ne dis rien. Mon rôle c’est de soigner, pas de sermonner, ou de faire tomber une superstition que je qualifierais de ” bienheureuse ” – puisqu’elle l’aide moralement.
Non ?… Vous feriez quoi à ma place ?…
Moi, j’écoute Madame Ouija et je me tais.
La vérité, c’est qu’elle me touche. J’aime bien les êtres humains. Pas tous. Mais certains, quand ils parlent à leur mort, je les aime plus que les autres.
Vous feriez quoi à ma place ?…

P.S. : pour détendre l’atmosphère, je vous annonce que dans le prochain post, je vous montrerai mon kiki. Voilà !

Avec un peu de chance, en croisant les doigts, en l’espérant très fort, en se disant que cela ne peut être autrement.

Photographie : Austin Tott

Alors voilà il y a trois ans, on a soigné cette dame, Mme K.. Elle ne voulait pas de morphine, pas d’apitoiement et pas de larmes. Comme on s’inquiétait pour elle, elle a dit “Vous ne comprenez pas. Ce n’est pas que je vais mourir, c’est que je suis arrivée à la fin de ma vie”. Cette phrase, pour elle, c’était important.
Mme K. est morte il y a trois ans.
Je n’ai pas oublié, je l’ai écrit ICI. De tous les textes que j’ai écrits pour vous, c’est l’un de mes préférés.
[…]
L’autre jour, au cabinet, j’ai reçu un homme, la petite quarantaine effondrée de tristesse. Son père était en train de mourir :
– C’est mon père, ce sont nos souvenirs, l’enfance et le reste.
J’ai essayé de trouver les bons mots. Peine perdue, il était inconsolable (ou j’étais vraiment nul !)
– Papa me dit ne pas être triste, de ne pas m’apitoyer et d’aller de l’avant. Mais j’y arrive pas. C’est mon père… Il y a tout un tas de souvenirs qui remontent et… et…
Il n’a pas pu finir sa phrase, il était devenu un grand paquet de sanglots. Impossible de le toucher, impossible de le secouer. Il était plein de larmes et tout débordait.
Désemparé, je ne sais pas ce qui m’a pris. J’ai repensé à Mme K., et j’ai dit :
– Vous savez, votre père a eu une longue et belle vie. Il ne va pas mourir, il va arriver à la fin de sa vie. C’est différent. Vous comprenez ?…
Il a relevé la tête, il a semblé un peu choqué par ce que je venais de dire. Puis il a souri.
– Vous avez raison, ce n’est pas du tout pareil.
J’avais gagné.

Là, j’ai repensé à Mme K. Elle n’avait jamais été aussi vivante qu’à cet instant précis. Trois années se sont effondrées, deux lieux et deux temps se sont rejoints. Trois personnes, un bref instant, ensemble : Mme K. dans sa chambre d’hôpital, le fils de cet homme et moi.
Minute violon, New Age, yoga et Joséphine Ange-gardien (oui, je me suis forcé à mettre une pointe d’humour. Je ne voudrais pas que vous me preniez pour un garçon sensible…) : ça va vous paraître étrange, mais je crois que madame K. m’a tenu la main. Et je crois que, peut-être, avec un peu de chance, en croisant les doigts, en l’espérant très fort, en se disant que cela ne peut être autrement, TOUT est lié à TOUT dans ce monde.
Oui, avec un peu de chance, en croisant les doigts, en l’espérant très fort, et en se disant que cela ne peut être autrement…

(Sans transition, parce que je ne suis pas un garçon sensible : si vous aimez cet article ou plus globalement le site en général, partagez sur vos réseaux sociaux et par pigeons voyageurs !)

Les cordonniers mal chaussés… (partie II)

(Suite du post ci-dessous)

Elle s’est pas loupée la puce. Je commence à retirer délicatement le pansement, la gamine hurle, mon ventre se tord.
Je me rends compte que c’est beaucoup plus facile quand c’est quelqu’un que vous ne connaissez pas (oui, vous pouvez sourire…) Je jette un coup d’œil rapide. C’est profond, ça saigne, et surtout, c’est ma nièce.
Je la prends dans mes bras, la rassure, la porte jusqu’à la voiture, démarre. Mon téléphone sonne.
– N’oublie pas qu’elle a six ans et qu’elle monte à l’arrière ! m’avertit sa mère.
– Pour qui tu me prends ! Je ne suis pas inconscient ! dis-je en arrêtant la voiture pour sortir et mettre ma nièce à l’arrière (dingue ça, j’avais zappé ce détail).
On arrive aux Urgences. Accueil.
– Voilà voilà.
Je bafouille, tends des papiers, fais tomber des cartes, dis que je suis le tonton. Elle me pose des questions, regarde la petite qui est aussi noire que je suis blanc, paraît surprise. Je souris, la petite grimace, la secrétaire d’accueil aussi. On s’assoit. On attend. Je lui donne mon téléphone pour qu’elle joue avec. Je pose ma tête sur sa coupe afro : c’est génial une coupe afro, tu poses ta tête dessus, Boïng-Boïng, ça rebondit, et tu peux t’endormir en sentant le monoï et la noix de coco. S’endormir oui, mais pas longtemps. Des portes s’ouvrent, des mauvaises nouvelles, des gens s’agitent. Je m’agite. On se regarde les uns les autres, quand l’un des patients est appelé il se lève et s’en va, tel un gagnant du loto ou du ticket d’or dans Charlie et la Chocolaterie.
Moi je reste avec ma petite Ompa-Lompa de nièce qui sent les îles et les larmes. Je lui suturerais bien sa jambe, mais je peux pas. C’est elle, ma petite Ompa-Lompa, et si elle pleure je vais pleurer. Je suis une mauviette qui sent la transpiration, la clope froide, et, maintenant, le monoï.
Impuissance et impatience. Finalement, la puce s’en sortira avec douze points de suture… six heures après !

Minute humour pour mes lecteurs qui sont soignants et pas patients : c’est quand même très horrible d’attendre aux urgences, je veux dire, c’est VRAIMENT horrible… Un peu comme attendre 24 heures la suite d’une histoire…

Les cordonniers mal chaussés…

Alors voilà, j’étais rentré très tard de boîte de nuit, environ neuf heures du matin, quand ma mère m’a appelé pour me proposer de passer prendre le petit-déjeuner.
– Je te fais des crêpes, tu viens ?
L’appel du ventre. Je suis faible, j’ai dit oui.
Je suis arrivé en sentant la transpiration, la clope froide, et le petit relent d’alcool qui vous colle à la peau après les bonnes soirées. D’ailleurs, la mère ne s’y est pas trompée :
– C’est quoi cette odeur de fumée ? Tu fumes ? a-t-elle fait d’un air de tragédienne antique.
– Ben, maman, faut que je te dise la vérité : en réalité, je suis un train.
J’ai ri. Pas ma mère. J’ai mangé mes crêpes en pensant à mon lit et à ses draps propres. J’allais dormir comme un prince. Mon téléphone a sonné, ma sœur.
– L’école a appelé, ta nièce s’est fait mal, ils disent qu’il faut l’amener aux urgences, je suis coincée au boulot, tu peux aller voir ?
[Là, j’ai bien compris que j’allais pas pouvoir manger mes crêpes et que le dodo attendrait plus tard]
– Ok, ok, j’y vais.
J’adore ma nièce. Elle m’adore aussi, mais c’est normal : je suis le plus cool (et modeste) des tontons.
J’ai marqué des points le jour où, à l’âge de trois ans, elle est venue me demander si elle pouvait jouer avec son caca.
– Oui, ma chérie, mais seulement si c’est pour écrire un poème sur le caca.
(((((((Elle s’attendait à ce que je dise non : pour marquer des points avec les gosses, il faut les étonner. Enfin, c’est mon avis. )))))))
[…]
Elle s’est pas loupée la puce. Je commence à retirer délicatement le pansement, la gamine hurle, et je

LA SUITE DEMAIN À 9 heures 13 minutes 12 secondes. Je vous embrasse.

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